LE MAL-LOGEMENT S'EST AGGRAVÉ EN FRANCE

Les personnes sans domicile a fortement augmenté et la demande pour des logements sociaux a explosé.Sdf sans abrie

Ces dernières années, le nombre de

"La crise sanitaire a révélé à quel point le mal-logement ou le fait d’être sans domicile constituaient un handicap majeur et supplémentaire pour les personnes en difficulté", explique Laurent Desmard président de la Fondation Abbé Pierre en préface de son 27ème rapport annuel sur l’état du mal-logement en France.

Pourtant, "la crise a montré l’importance des bonnes conditions de logement à l’heure des confinements et de la montée en puissance du télétravail", poursuit-il en demandant aux acteurs politiques de s'engager dans la lutte contre les exclusions, notamment pour le logement, qui en plus de connaître une hausse des prix considérable depuis 20 ans, fait face à des difficultés de construction.

Au total, la fondation estime qu'il y a désormais 4,1 millions de personnes mal logées en France. Il peut s'agir de personnes sans domicile (300.000), dont la résidence principale est une chambre d'hôtel (25.000) ou contraintes de loger chez des tiers (643.000). Sont compris aussi 2,09 millions de personnes en privation de confort et 934.000 en surpeuplement accentué. "Outre ces situations les plus graves, 12,1 millions de personnes sont touchées à des degrés divers par la crise du logement", note la fondation.

Des hébergements d'urgence saturés

Le nombre de personnes sans domicile a ainsi doublé depuis 10 ans, selon les estimations de la fondation qui indique que 300.000 personnes au moins n'ont pas de logement. Le quinquennat aurait même rendu les pauvres plus pauvres selon le rapport qui cite une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP). Celle-ci estime que de 2017 à 2022, les Français ont gagné en moyenne 1,6% par an de pouvoir d'achat via les décisions de l'exécutif. Mais il y a des disparités et les 5% les plus pauvres n’ont globalement pas profité des baisses d’impôts, alors qu'ils ont fait face à des hausses de taxes (énergie, tabac).

"Les Français, qui vivent avec moins de 800 euros par mois, ont perdu 0,5 % de pouvoir d’achat, soit 39 euros par an", souligne la fondation Abbé pierre. Rappelons que les chiffres de l'IPP sont contestés par Bercy, qui avait sorti une autre étude concluant que les 10% les plus pauvres avaient plus gagné de pouvoir d'achat (+4%) que les 10% les plus aisés (+2%).

Pour la fondation Abbé Pierre, les effets de la crise sanitaire ont ruisselé sur le mal-logement avec la saturation de l'hébergement d'urgence, malgré les efforts du gouvernement pour augmenter le nombre de places, en créant 40.000 places supplémentaires pour un total de 200.000 places selon le gouvernement. Une situation critique dans les grandes villes.

"Début décembre, près de 4.000 personnes appelaient chaque soir en vain le 115 faute de places. Ce chiffre important ne reflète pas le besoin réel, puisque d’après la dernière enquête de la Fédération des Samu Sociaux, 80% des personnes à la rue rencontrées par les maraudes n’avait pas appelé le 115 ce jour-là", souligne le rapport.

Forte demande en logements sociaux

Par ailleurs, les demandes logements sociaux explosent depuis plusieurs années. "En sept ans, la demande de logement social progresse cinq fois plus vite que le nombre de ménages et deux fois plus vite que le nombre de logements sociaux, pour atteindre 2,2 millions de ménages", explique le rapport.

Dans le même temps, la construction de logements sociaux est à la peine et n'atteint pas les objectifs fixés par le gouvernement. En 2021, environ 100.000 logements sociaux ont été autorisés alors que l'objectif était d'atteindre 120.000. Sachant que l'année précédente, le nombre de logements sociaux autorisés n'avait pas dépassé 90.000. Le secteur doit donc rattraper un retard qui s'accumule année après année.

La fondation rappelle également que les dépenses sont en baisse. "Les aides publiques au secteur du logement, exprimées en pourcentage de PIB, diminuent depuis 10 ans et n’ont jamais été aussi basses (1,6 % du PIB en 2020), alors que les recettes fiscales que rapporte le logement à l’État ont plus que doublé en 20 ans (79 milliards d’euros)". La fondation se désole que le plan de relance n'ait pas concerné le logement (en dehors principalement du volet sur la rénovation énergétique).

Bien que le gouvernement ait décidé de plafonner les loyers à Paris, Lille, Lyon, Villeurbanne notamment, les loyers restent souvent au-dessus des plafonds par exemple des études publiées par PAP (42% des annonces au-dessus des plafonds à Paris) ou Meilleurs Agents le révèlent (à Lyon et Villeurbanne 57% et 43% des annonces dépassaient les nouveaux seuils avant l'entrée en vigueur du dispositif).

La pression d'Airbnb

"La dérégulation du marché locatif est aussi due à la progression des locations de meublés touristiques de courte durée de type Airbnb depuis une dizaine d’années", note le rapport.

Une ville comme Colmar a d'ailleurs vu exploser le nombre de location type Airbnb pour atteindre 10% des logements du centre-ville et a décidé de mettre un coup de frein à la location saisonnière en fixant de nouvelles règles. Le pouvoir d'achat, qui est au coeur de la présidentielle, va de pair avec le coût du logement qui est un des postes de dépenses les plus élevés pour les ménages.

Et ce déséquilibre inquiète même l'OCDE qui a publié un rapport* en 2021 soulignant que, dans les pays développés, l'accès à un logement abordable devient "de plus en plus difficile". De 2005 à 2015, le poids du logement dans les dépenses des ménages de l’OCDE a connu une hausse de près de 20%.

Autre constat, les baisses des aides au logement dans le cadre de la réforme de l'allocation personnalisée au logement, avec notamment la prise en compte des revenus en "temps réel" (et non plus avec deux ans de décalage). "Les chiffres du gouvernement confirment que la réforme des APL fait surtout des perdants: sur six millions d’allocataires, 30% ont perdu en moyenne 73 euros (400.000 ménages ont même perdu toute allocation), tandis que 18% ont gagné 49 euros (115.000 sont devenus allocataires). Le principal gagnant est au final l’État, qui réalise 1,1 milliard d’euros d’économies en 2021", estime la fondation.

Les principales victimes du mal-logement? Les jeunes, actifs ou étudiants, qui sont des "victimes sociales" de la crise pour la fondation. Les quartiers populaires sont également durement touchés par la crise, avec des situations de surpopulation et un creusement des inégalités.

"Les habitants les plus précaires et les plus isolés de ces quartiers ont vu soudainement leur survie dépendre des solidarités de proximité", ajoute la fondation. Quant à la rénovation énergétique, qui a bénéficié d'un investissement massif du gouvernement, la fondation constate que les aides ne concernent que des petits montants et par des ménages modestes.

Dans ce contexte, le rapport dresse un bilan au vitriole du quinquennat et alerte sur les mesures à prendre de toute urgence en proposant des solutions comme l'augmentation de la production de logement sociaux et le vote d'une loi de programmation pluriannuelle pour le logement, portant l’effort public à 2% du PIB, la mobilisation des logements vacants, la régulation du foncier, la généralisation du plafonnement des loyers à toutes les zones tendues, un meilleur encadrement de la location saisonnière en donnant des moyens de régulation aux territoires ou encore la revalorisation des APL en annulant la coupe de 5 euros du début de quinquennat. Le président Emmanuel Macron défendra son bilan face à la fondation mercredi matin par vidéo conférence.

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